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04.04.2002

Blocher propose une coupe de 20% du budget de l’Etat

Réflexions: Entretien avec le conseiller national sur l'Etat libéral Interview dans L'Agefi du 4 avril 2002 Les dépenses étatiques pour la culture et les loisirs devraient être supprimées. L'entrepreneur et politicien est connu pour son goût de la controverse. L'agefi s'est entretenu avec Christoph Blocher sur les conditions d'un ordre libre et leurs implications pour la politique actuelle. Pour le Zurichois, les sirènes de l'idéologie socialiste exercent encore beaucoup trop d'influence dans notre pays. Propos recueillis par Pierre Bessard Il y a vingt ans vous étiez président d'Action Libérale (alors l'Association pour la liberté, le fédéralisme et le droit), un groupe de pression créé dans les années trente pour éviter que la Suisse ne se rallie aux dérives socialistes et fascistes alors à la mode dans le reste de l'Europe. A quand remonte votre adhésion aux idées libérales? Christoph Blocher: A l'époque de mes études dans les années soixante. Certains d'entre nous étudiaient les économistes de l'école libérale, tandis que d'autres idolâtraient Mao Tsé-toung. Le conseiller fédéral Moritz Leuenberger et le directeur d'Avenir Suisse, Thomas Held, qui a maintenant retourné sa veste, faisaient partie du second groupe. Le socialisme a toujours été une idéologie confortable, car elle crée l'illusion que l'être humain n'a pas besoin d'assumer la responsabilité de ses propres actes, voire de sa propre existence. Sur quels penseurs appuyez-vous vos convictions? Blocher: Des économistes tels que Friedrich von Hayek, Ludwig von Mises ou encore Wilhelm Röpke ont montré que l'esprit collectiviste, ou "solidaire", sert de racine aussi bien au socialisme de gauche qu'au national-socialisme de droite. L'école libérale contemporaine, notamment aux Etats-Unis, continue de bâtir sur les travaux de ces penseurs. Le reste, je l'ai acquis avec l'expérience de la vie. Quelles sont les implications politiques du libéralisme? Blocher: Un Etat libéral s'appuie sur la responsabilité et l'initiative individuelles de l'être humain. Un tel ordre politique crée non seulement les conditions pour plus de prospérité matérielle, mais garantit aussi la liberté spirituelle de chacun. Il s'agit là de questions que des philosophes comme Karl Popper ou Hannah Ahrendt ont également mises en évidence. Quelle est la situation actuelle en Suisse sur ce front? Blocher: La Suisse n'est évidemment pas un pays socialiste. Mais l'idéologie socialiste exerce beaucoup trop d'influence dans notre pays. On se tourne toujours trop souvent vers l'Etat, comme dans le cas de Swissair. Cet exemple montre parfaitement le socialisme sous-jacent des partis, des banques, de l'économie et d'Economiesuisse. Le socialisme les a séduis parce qu'à court terme, il offre une solution au problème. L'affaire est pourtant claire: si le marché a besoin d'une compagnie aérienne, celle-ci sera forcément rentable. Et dans ce cas, il n'y a pas besoin de l'intervention de l'Etat. La nouvelle compagnie peut encore s'avérer rentable. Blocher: Oui, mais cela n'enlève rien au fait que les citoyens ont payé deux milliards de francs. Et cela se répercute sur les finances de la Confédération. Expo 02 est un autre exemple typique: avec l'argent des autres, il est facile de réaliser beaucoup de choses. On oublie que la situation économique du pays est ainsi affaiblie. Economiesuisse est pourtant censée représenter les intérêts de l'économie. Blocher: On ne peut pas partir du principe que l'entrepreneur ou le manager défend d'emblée une économie de marché libérale. Si le socialisme lui rend service, il vit aussi très bien avec le socialisme. Economiesuisse a soutenu l'intervention de l'Etat pour Swissair et en échange, son président, qui était aussi administrateur de Swissair, a proposé de renvoyer à plus tard une diminution d'impôts prévue pour toutes les entreprises. Economiesuisse avait aussi clairement indiqué dans le passé qu'une seule transversale ferroviaire à travers la Suisse suffisait. Ensuite, elle a financé la propagande pour deux voies pour obtenir quelque chose d'autre en retour. Economiesuisse a perdu sa crédibilité car elle soutient toujours des intérêts particuliers quand cela arrange momentanément l'un de ses membres, selon le principe "Du gibst mir die Wurst, und ich lösche dir den Durst" ("Tu me donnes à manger et je t'étanche la soif"). On augmente ainsi constamment la quote-part de l'Etat et on affaiblit l'économie dans son ensemble. Y a-t-il un espoir pour que la tendance s'inverse? Blocher: Actuellement, la situation ne se développe pas dans le bon sens. Les bonnes années économiques que nous avons eues réduisent la pression de mener une bonne politique économique libérale. Au début des années nonante, en revanche, la pression avait augmenté en raison des difficultés d'alors. C'est un phénomène que les économistes ont aussi observé. Prenez l'exemple des Etats-Unis après la guerre du Vietnam, lorsqu'ils se trouvaient à terre. Les économistes libéraux ont alors conseillé à Reagan une baisse d'impôts radicale et douze ans de haute conjoncture ont suivi. Mais une fois que les caisses sont remplies, on se laisse à nouveau séduire par les sirènes du socialisme, y compris aux Etats-Unis. Quelles économies favoriseriez-vous pour diminuer la quote-part de l'Etat? Blocher: Le mieux serait vraisemblablement de réaliser des coupes linéaires de l'ordre de 20%. Lorsque vous observez ce que dépense l'Administration fédérale, par exemple pour les agences de relations publiques, vous vous rendez vite compte que les coûts sont surélevés d'au moins 20%. C'est ce que je préconiserais dans l'une de mes entreprises si j'observais une utilisation des fonds aussi légère. Quel serait selon vous la limite acceptable de la quote-part de l'Etat? Blocher: La quote-part de l'Etat se monte aujourd'hui à 50% du PIB si vous incluez toutes les assurances obligatoires. A mon avis, la quote-part totale devrait être limitée à 30% du PIB pour être supportable, ce qui est déjà beaucoup. Car il faut aussi analyser la contre-partie. Que recevons-nous en échange de l'Etat? De tout ce que je reçois, il y a peu de choses qui me servent. L'Etat m'oblige à contracter une assurance maladie, par exemple, mais je peux très bien décider moi-même si j'en veux une. En plus des impôts que nous payons, l'Etat encaisse en plus des taxes et des droits pour un très grand nombre de prestations. Même la police facture certains services. Ce qui reste financé par les impôts, c'est la sécurité nationale, les écoles et les routes régionales. Mais l'Etat encaisse aussi beaucoup d'argent pour des choses que d'autres feraient tout aussi bien, sinon mieux. Qu'en est-il des dépenses pour la culture et les loisirs? Blocher: Ces dépenses devraient être complètement supprimées. Le secteur privé peut très bien s'en charger. Dans le domaine de la culture, la situation est critique, car l'Etat décide de ce qui est une "bonne" culture. Pro Helvetia, par exemple, a ses propres artistes. Et ceux qui n'en font pas partie n'ont plus aucun espoir, car les mécènes privés n'arrivent plus à les soutenir en raison des impôts élevés qu'ils doivent payer. L'activité culturelle de l'Etat est extrêmement problématique. L'économie libre est souvent défendue pour des raisons altruistes, pour sa capacité de financer l'Etat "social". N'y a-t-il pas là aussi un danger? Blocher: Je suis convaincu que si nous ne plaçons pas la responsabilité individuelle au centre de nos préoccupations, il sera difficile de maintenir les conditions pour créer le plus de prospérité possible pour chacun. Contrairement au collectivisme, l'ordre libéral correspond à la réalité humaine et dans ce sens, c'est un système éthique. Une personne démunie ne rêve pas d'émigrer à Cuba ou dans un pays africain, mais aux Etats-Unis ou en Suisse, c'est-à-dire dans des juridictions où chacun a la possibilité de prospérer. On parle aujourd'hui beaucoup de "solidarité". Quelle signification attribuez-vous à ce mot? Blocher: On commet beaucoup d'abus avec ce mot. Pour moi, la solidarité signifie que je m'engage personnellement pour une personne démunie, avec mon argent et mon revenu, ou avec ma force et mes capacités. Aujourd'hui, les politiciens sont "solidaires" avec de l'argent qui ne leur appartient pas. Ils distribuent l'argent des impôts, que d'autres paient, et s'affichent ensuite en bienfaiteurs. Nous pourrions cependant tout aussi bien considérer ces politiciens comme des voleurs: ils distribuent l'argent des contribuables pour ne pas avoir à puiser dans leurs propres poches et prétendent en plus faire le bien. Je suis dur sur cette question, car c'est une pratique hypocrite. Les gens que je connais qui sont vraiment solidaires n'en parlent généralement pas, ils font tout simplement ce qu'ils estiment juste. Le Conseil fédéral parle d'une "fondation de solidarité". Blocher: Oui, c'est typique! Kaspar Villiger affirme qu'il y a d'autres valeurs que les francs et les centimes et qu'il serait égoïste de garder tout l'or de la BNS pour nous. Blocher: Si Villiger décidait de distribuer sa propre fortune, je ne l'en empêcherais pas. Villiger est le chef suprême des finances publiques et il sait très bien qu'on pourrait justifier n'importe quelle tâche de l'Etat en argumentant de cette manière. Mais il doit aussi savoir que si l'argent est distribué ainsi, la prospérité de la Suisse est mise en péril. Nous voulons attribuer cet or à l'AVS pour éviter une augmentation de la TVA au moins jusqu'en 2010. En supposant un rendement de 5%, cela représenterait une source de revenu annuel d'environ un milliard de francs pour l'AVS. C'est aussi une solution solidaire, mais avec les gens de ce pays, à qui cet or appartient. Certains reprochent à votre initiative sur l'or de ne pas conserver le capital. Blocher: Ceux qui le disent n'ont pas lu l'initiative, qui prévoit les deux options: l'attribution à l'AVS du capital ou de ses revenus, ce que la loi fixera ensuite. Mais vous remarquez ici une erreur de raisonnement flagrante: une fortune ne vaut que ce qu'elle rapporte en revenus. Si les revenus sont versés à quelqu'un d'autre, cette fortune ne vaut plus rien. Si vous possédiez un immeuble dont les loyers étaient attribués à des causes "solidaires", le titre de propriété sur cet immeuble ne vous servirait à rien. L'initiative sur l'or ne retarde-t-elle pas une privatisation de l'AVS? Blocher: Vous devez placer l'initiative dans son contexte. La plupart des politiciens, y compris Economiesuisse et le Conseil fédéral, veulent une augmentation de la TVA pour financer l'AVS. Nous, en revanche, nous opposons à toute augmentation d'impôts. Si le Conseil fédéral proposait une autre solution, nous n'aurions pas lancé cette initiative. Le gouvernement propose cependant d'attribuer l'or au budget de l'Etat et d'augmenter en plus les impôts pour l'AVS. Cela signifie deux fois une augmentation de la quote-part de l'Etat! On parle aussi de rembourser une partie des dettes avec cet or. Blocher: Des voix d'Economiesuisse et du Parti radical se sont récemment exprimées dans ce sens. Mais il y a là aussi un danger: en remboursant une partie des dettes, on en abaisse le plafond, ce qui ouvre la voie pour contracter de nouvelles dettes. C'est d'ailleurs pour ça que l'on propose cette solution. On pourrait aussi discuter d'une diminution des impôts, mais personne n'a retenu cette possibilité. N'en demeure-t-il pas moins que l'AVS devrait être privatisée, c'est-à-dire intégrée au deuxième pilier? Blocher: Une privatisation aurait l'avantage d'amener de la concurrence dans le système et de faire en sorte que chacun s'occupe de son propre avenir. Je pense que cette question va gagner en importance si les difficultés de financement s'aggravent. Mais pour l'instant, il faut reconnaître que l'AVS est un système bon marché et plutôt bien géré. Votre entreprise réalise plus de 90% de son chiffre d'affaires à l'étranger. En même temps, vous présidez un lobby de politique étrangère, l'Action pour une Suisse indépendante et neutre, que de nombreux observateurs qualifient d'"isolationniste". Se trompent-ils de prémisse ou vous contrariez-vous? Blocher: On ne peut pas considérer comme isolationniste un pays qui veut déterminer librement son sort. Je suis en faveur de l'ouverture sur le monde et du libre-échange. Cela signifie que nous cultivons des échanges avec le monde entier non seulement au niveau commercial, mais aussi sur les plans culturel et politique. En même temps, j'estime que chaque pays doit pouvoir déterminer sa propre politique. Il n'y a là aucune contradiction, au contraire: la décentralisation du pouvoir politique est une pré-condition pour un ordre libéral. A défaut, vous obtenez une situation où un petit groupe d'individus détient le pouvoir sur tous les autres. C'est ce que nous voulons éviter. A quel point les activistes "anti-globalisation" doivent-ils être pris au sérieux? Blocher: Mon entreprise vend aux quatre coins du globe des produits fabriqués essentiellement en Suisse, mais je n'ai jamais remarqué que je dirigeais une entreprise "globalisée". Le libre-échange mondial permet aux pays pauvres de s'enrichir, pour autant qu'ils puissent produire des biens qui sont commercialisables. Mais de nombreux pays veulent atteindre le niveau de prospérité de l'Occident sans la culture d'initiative individuelle nécessaire. C'est pourquoi je pense que chaque pays doit pouvoir établir ses propres règles et déterminer sa politique en la matière. En Suisse, je m'engage pour le libre-échange, mais je suis contre un gouvernement mondial qui dicterait à tout le monde les règles du jeu. * * * Du tac au tac Tyler Brûlé Beaucoup de vent. Friedrich von Hayek Un grand penseur, qui montre le chemin à suivre. Silvio Berlusconi Pas un mauvais président, mais la justice doit rester indépendante. Jacques Chirac Un homme très emmêlé. New economy Les visions ne se vendent pas, les produits oui. Stock-options Un bon instrument, à condition de ne pas en changer les termes quand ça va mal. WEF Davos Je n'ai rien contre, mais n'y ai jamais participé. Expo 02 Un affront envers le contribuable. Swiss Qu'une compagnie aérienne s'affuble de ce nom est problématique, car si elle tourne mal, la réputation de la qualité suisse est touchée. L'indice SMI fin 2002 Sera plus haut qu'en début d'année * * * Christoph Blocher Christoph Blocher, docteur en droit, est CEO et président du conseil d'administration du groupe Ems, une entreprise multinationale spécialisée dans les matériaux polymères, les spécialités chimiques et l'ingénierie. L'entrepreneur détient deux tiers du capital de la société, rachetée en 1983. En moins de vingt ans, la capitalisation d'Ems a passé de 40 à 3.350 millions de francs, ce qui équivaut à un quadruplement annuel de la valeur de l'entreprise. Depuis 1979, Christoph Blocher siège au Conseil national, où il s'est profilé avant tout en politique étrangère et en politique économique. Le magazine économique Bilanz vient de le nommer l'homme le plus puissant de Suisse. (PB)

03.04.2002

Goldinitiative ist die beste Lösung

Interview mit "Finanz und Wirtschaft" vom 3. April 2002 Interview: Peter Kuster Herr Blocher, vor einigen Tagen hat sich ein Komitee konstituiert, das für ein Nein zur Goldinitiative der SVP und zum Gegenvorschlag, d.h. für die Drittelslösung, wirbt. Die meisten Mitglieder sind freisinnige Parlamentarier; erstmals treten gewichtige Exponenten ausserhalb Ihrer Partei gegen die Drittelslösung an, deren Kernstück die Solidaritätsstiftung ist. Sollten Sie jetzt nicht die Goldinitiative zurückziehen, um mit vereinten Kräften die Solidaritätsstiftung zu bodigen? Christoph Blocher: Nein. Zum einen aus taktischen Gründen. Ein Rückzug unserer Initiative würde die Chancen des Gegenvorschlags erhöhen, nicht vermindern. Denn wahrscheinlich werden alle vier Bundesratsparteien unterschiedliche Parolen herausgeben - eine meines Wissens einmalige Konstellation in der Abstimmungs-Geschichte. Zum andern, und das ist der wichtigere Grund, bildet die Goldinitiative die beste Lösung. Sie überträgt das überschüssige Nationalbankgold - also rund 20 Mrd. Fr.-- oder dessen Ertrag dem Ausgleichsfonds der AHV. Wäre es denn nicht klüger, das ‹überschüssige› Gold für den Schuldenabbau zu verwenden, wie es das Komitee für ein doppeltes Nein empfiehlt? Blocher: Das Komitee will das Überschussgold dem Bund und den Kantonen zugute kommen lassen. Diese werden damit aber höchstwahrscheinlich nicht empfehlungsgemäss Schulden tilgen - sie werden das Geld ausgeben. Dadurch würde sich die Staatsquote erhöhen. Selbst wenn sie zuerst tatsächlich Schulden beglichen, wäre das Risiko, dass sie den neuen Spielraum bald für eine Neuverschuldung bräuchten, enorm. Mit der Goldinitiative sowie anderen Massnahmen stellen wir dagegen sicher, dass bis mindestens zum Jahr 2010 für die AHV mit gleichen Leistungen keine Erhöhung der Mehrwertsteuer nötig sein wird. So halten wir die Steuerquote stabil. Aber die strukturellen Probleme der AHV werden nicht gelöst. Blocher: Gelöst werden sie nicht, aber die Goldinitiative trägt dazu bei, die AHV-Leistungen zu garantieren, ohne die Mehrwertsteuer erhöhen zu müssen. Die Kantone, immerhin die Mehrheitsaktionäre der Nationalbank, gehen leer aus. Schadet die Goldinitiative nicht dem Föderalismus? Blocher: Der Verteilschlüssel für Kantone und Bund von zwei zu eins gilt nur für die Ausschüttungen der Erträge der Nationalbank, nicht aber für die nicht mehr benötigten Währungsreserven. Denn die Reserven wurden nicht von den Kantonen erschaffen, sondern vom Volk erarbeitet. Zudem sind die Kantone von Anfang an für die Solidaritätsstiftung eingetreten... ...und begründeten das mit "übergeordneten Interessen"... Blocher ...was selbstverständlich auch auf die AHV zutrifft. Die Nationalbank steht der Initiative skeptisch gegenüber, weil der Umfang der zu transferierenden Reserven nicht genau festgelegt wird. Gefährdet die Initiative die Selbständigkeit der Nationalbank? Blocher: Wir haben uns mit der Formulierung ‹für geld- und währungspolitische Zwecke nicht mehr benötigte Währungsreserven› an die Sprachregelung der Nationalbank gehalten. Die Volksinitiative enthält keine Aussage darüber, wer die Höhe der überschüssigen Reserven bestimmt und tastet somit die heutige Kompetenzregelung nicht an. Die Goldinitiative bezog sich ursprünglich nur auf das Überschussgold. Das Finanzdepartement hat vor kurzem mit der Nationalbank eine neue Vereinbarung ausgehandelt, gemäss der in den nächsten zehn Jahren nicht nur Gewinne, sondern auch ‹überschüssige› Währungsreserven von 13 Mrd.Fr. an Bund und Kantone verteilt werden. Widerspricht dies nicht dem Wortlaut Ihrer Initiative? Blocher: Sofern die Nationalbank tatsächlich Reserven und nicht Gewinne ausschüttet, gehören diese in die AHV. Werden Reserven durch eine Absprache zwischen Nationalbank und Finanzdepartement verteilt, wird es problematisch.

13.03.2002

Alleingang kommt nicht in Frage

Interview mit der HandelsZeitung vom 13. März 2002 Ems-Chemie AG - Mehrheitsbesitzer Blocher kann sich einen Aktienrückkauf vorstellen, aber nur mit einem Partner. Steigt Martin Ebner bei der Ems ein? Interview: Mélanie Rietmann und Reto Schlatter Sie haben etwas Unübliches getan: Den Goodwill mit einem Schlag aus der Rechnungslegung verbannt und damit eine 30%ige Gewinn-Reduktion riskiert. Weshalb wollten Sie gerade jetzt "reinen Tisch" machen? Christoph Blocher: Zunächst eine Richtigstellung: Wir hatten schon vorher immer einen "reinen Tisch". Aber Sie mokieren sich über die "Kreativität in der Buchhaltung" bei andern Unternehmen. Was verstehen Sie darunter? Blocher: Ich stelle fest, dass Kreativität in gewissen Unternehmen fast nur noch in der Buchhaltung eine Rolle spielt. Dort aber ist diese Eigenschaft unzulässig. Buchhalterische Tricks zahlreicher Unternehmen sind ein wirtschaftliches Problem und führen dazu, dass Anleger den Firmen kein Vertrauen mehr schenken. Es wird zu viel geschummelt. In dieses Kapitel gehören auch die Pro-forma-Abschlüsse, die ja ihrem Namen alle Ehre machen. Nach einem halben Jahr folgen dann die Geschäftsberichte, die niemanden mehr interessieren - und das falsche Bild ist perfekt. Hinzu kommt die ganze Problematik mit den Goodwill-Abschreibungen, die auch in den USA Wellen geworfen hat. Wir haben den gesamten Goodwill von mehr als 37 Mio Fr. über die Erfolgsrechnung auf null abgeschrieben und nehmen einen geschrumpften Reingewinn in Kauf. Wo liegt Ihrer Meinung nach der Grund für die von Ihnen skizzierte Fehlentwicklung? Blocher: Dass sich in der Vergangenheit die gesamte Finanzwelt nur für Gewinnent- wicklungen und -erwartungen interessiert hat. Das Studium der Bilanz wurde völlig vernachlässigt, aber hier manifestiert sich die Substanz eines Unternehmens. Die jüngsten Vorfälle bieten ein anschauliches Beispiel: Nehmen Sie Enron, Swissair oder andere. Nicht die Gewinnentwicklung war das Hauptproblem, sondern die Bilanzwerte: Die Eigenkapitaldecke war zu dünn, die Verschuldung zu hoch und die Goodwill-Abschreibungen belasteten Gewinn und Bilanz. Wenn wir gerade beim Eigenkapitalanteil sind: Er liegt bei der Ems mittlerweile bei über 50%, und Sie machen sich anscheinend Gedanken über eine künftige Kapitalstruktur. In einem früheren Gespräch haben Sie ein Going-Private ausgeschlossen. Das ist offenbar kein Tabu mehr? Blocher: Das Eigenkapital macht bei Ems über 50% aus, und die Kapitalrendite lag in den letzten fünf Jahren durchschnittlich bei über 20%. Für mich allein kommt ein Going-Private trotzdem nicht in Frage. Es bedeutet einen Kapitalbedarf von über 1 Mrd Fr; das liegt für mich nicht drin. Ich könnte das Geld vielleicht beschaffen, was aber meinen finanziellen Spielraum allzu sehr einengen würde. Nicht in Frage kommt auch eine Geldaufnahme via die Ems-Firma. Ich möchte das operative Geschäft nicht mit Schulden für den Aktionär belasten. Was also kommt denn in Frage? Blocher: Es gibt die Möglichkeit, die Aktien zusammen mit anderen zurückzukaufen. Denken Sie an Herrn Ebner? Blocher: Ich denke eher an Partner, die nicht in erster Linie Kapitalanlagen machen - etwa Industrielle, die ihre Firma verkauft haben und sich noch gerne an einem privaten Unternehmen beteiligen, dessen Führung sie vertrauen. Es gibt solche Interessenten, aber der Nachteil beim Going-Private ist die beschränkte Kapitalisierungsmöglichkeit. Wenn dringend Kapital gebraucht wird - und das weiss man nie - dann kommt die Börse nicht in Frage. Bis wann wird über die Einführung der Einheitsaktie entschieden? Blocher: Bis Ende Jahr. Der Aktienmarkt von Ems ist eng geworden. Ich verfüge über 85% der Stimmen und zwei Drittel des Kapitals, was eine geringe Liquidität an der Börse zur Folge hat. Die Situation ist nicht befriedigend: Wenn ein Grosser einsteigt und viel kauft, steigen die Aktienkurse; verkauft er wieder, trifft das Gegenteil ein. Was ist mit einer Nennwertrückzahlung? Blocher: Auch die ist nicht ausgeschlossen, aber hier sind keine grossen Sprünge mehr möglich: Wir sind am unteren Limit. Ein freier Cashflow von 70% des gesamten Cashflows, null Nettoverschuldung und eliminierte Goodwill-Positionen. Was machen Sie mit dem vielen Geld? Akquirieren, Dividenden ausschütten oder investieren? Blocher: Bevor die Kapitalstruktur nicht gelöst ist, mache ich keine grossen Bocksprünge. Alle angesprochenen Möglichkeiten kommen in Frage. Themawechsel: Atisholz. Würden Sie diese Firma nochmals kaufen? Blocher: Kaum. Er erfolgte unter grossem Zeitdruck. Ich rechnete mit einem Worst-, einem Bad- und einem Best-case-Szenario. Nun ist der Bad-case eingetroffen. Das heisst, es dauert länger, bis wir in der Gewinnzone sind. Zu Ems passt die Firma nicht mehr, darum habe ich sie in die Emesta, die zu 100% mir gehört, überführt. Wenn wir alles gewusst hätten, was rausgekommen ist, hätten wir Atisholz nicht gekauft. Wann kommt Atisholz in die Erfolgszone? Blocher: Wir investierten 130 Mio Fr.; die neuen Produkte, die entwickelt wurden - es geht im Wesentlichen um Chemiezellstoffe und Hefeextrakte - werden jetzt eingeführt. Dieses Jahr rechnen wir mit einem Nullergebnis und dann mit steigenden Gewinnen. Da gibt es noch eine zweite Firma, an der Sie Interesse hatten. Was läuft bei Netstal? Blocher: Die letzten Verhandlungen fanden am 2. November statt. Es bleibt dabei: Siemens will Netstal nicht alleine verkaufen; ich will aber nur Netstal haben. Sind die Verhandlungen auf Eis? Blocher: Ja. Wie lange haben Sie Geduld? Blocher: Nicht ewig. * * * Fazit: Christoph Blocher hat sich - konsequent - einem antizyklischen Handeln verschrieben. Er bezeichnet seine Methode zwar als "handglismet", ist damit aber bislang richtig gelegen. Schade nur, dass die Besitzstrukturen zementiert sind. Das könnte sich aber ändern.

13.03.2002

«Bei mir zählt allein der Erfolg»

Interview mit der HandelsZeitung vom 13. März 2002 Christoph Blocher - Nach der Niederlage in der Uno-Abstimmung widmet sich der Politiker wieder vermehrt seinem Unternehmen. Und dort ist seine Nachfolgeplanung weit fortgeschritten. Seine vier Kinder stehen in den Startlöchern. Volkstribun Blocher äussert sich zur Zukunft seiner Firma Ems, hohen Managerlöhnen und Swiss. Interview: Mélanie Rietmann und Reto Schlatter Herr Blocher, haben Sie mit einer Niederlage bei der UNO-Abstimmung gerechnet? Christoph Blocher: Es ist weniger schlecht herausgekommen, als ich in den letzten Monaten befürchtet habe. Aber wir haben verloren, das ist betrüblich. Das heisst, die Schweiz hat verloren, weil die Schweiz geschwächt wird durch diesen Entscheid. Sind Sie daran, Ihre Nachfolge bei der Ems Chemie zu planen? Blocher: Ja natürlich. Meine älteste Tochter ist seit letztem Jahr im Verwaltungsrat; sie übernimmt bereits einen Teil der strategischen Planung. Der Sohn hat Chemie studiert und vor zwei Jahren abgeschlossen; zurzeit arbeitet er bei McKinsey. Die zweitälteste Tochter ist ebenfalls industriell tätig, sie leitet die Abteilung Forschung und Entwicklung und die Produktion der Zeltlifabrik Zile bei Aarau. Und die jüngste ist gerade am Abschluss in St.Gallen. Beste Voraussetzungen, dass die Ems in der Familie bleibt. Blocher: Ich will, dass alle Kinder zuerst Karriere ausserhalb der Ems machen. Sobald ich merke, dass sie die Fähigkeiten zu einer Führungsaufgabe besitzen, werde ich kürzer treten. Es muss niemand ins Unternehmen eintreten; es kommt aber auch niemand in Frage, der die Fähigkeiten dazu nicht hat. Wie lange wollen Sie noch CEO der Ems bleiben? Blocher: Bis eine Nachfolge Fuss fasst. In den nächsten Jahren dürfte dies der Fall sein. In der Öffentlichkeit sind Sie ja primär nicht als Unternehmer bekannt, sondern als Politiker. Wie viel Prozent Ihrer Arbeitszeit widmen Sie sich Ihren Unternehmen und wie viel der Politik? Blocher: Ein Drittel widme ich der Politik, zwei Drittel dem Unternehmen. Besteht nicht die Gefahr der Verzettelung? Blocher: Wenn ich in der Firma bin, habe ich immer das Gefühl, dass ich in der Politik etwas verbessern müsste. Und wenn ich mich in der Politik engagiere, denke ich, dass ich zurück ins Unternehmen sollte. Meine Stärke liegt in der Kombination von Unternehmer und Politiker. Ohne diese Kombination verliere ich meine politische Wirksamkeit. Deshalb nehme ich mich politisch auch nur zwei grossen Themen an, der Selbstbestimmung unseres Landes und der Wirtschafts-, Steuer- und Finanzpolitik. Setzen Sie auch als Unternehmer Schwerpunkte? Blocher: Ja, wie in der Politik. Wenn ich immer in der Unternehmung wäre, würde ich meine Direktoren mit all meinen Impulsen überfordern. Oder Ihnen auf den Wecker gehen ... Blocher: Das vielleicht auch. Ich bin mir bewusst, dass beides - Politik und Geschäft - eines Tages nicht mehr möglich sein wird. Dann müsste ich mich aus der Politik zurückziehen. Wie das Nationalrat Walter Frey im vergangenen Jahr getan hat. Blocher: Das könnte mir auch passieren. Aber zurzeit sieht es nicht so aus. Einer, der so viel abwesend ist im Unternehmen wie Sie, muss mit langer Leine führen. Blocher: Ja, eindeutig. Ich habe das Unternehmen in selbstständige Profitcenters gegliedert. Mit den Chefs dieser Profitcenters erarbeite ich die kurz- und langfristige Strategie und kontrolliere monatlich. Wenn einer operativ sehr gut arbeitet, sehe ich ihn während des Jahres selten. Für diese Aufgabe braucht es Leute, die bereit sind, die Chancen und Risiken eines Unternehmers selber zu tragen. Sie haben darum auch kleine Löhne und eine hohe Gewinnbeteiligung. Das heisst, Ihre Manager haben 2001 deutlich weniger verdient. Blocher: Ja, das ist klar. Die Details legen wir im April fest, wenn wir die genauen Zahlen kennen. Wenn die Ziele nicht erreicht werden, gibt es keinen Bonus. Wie hoch ist der Lohn Ihrer Topmanager? Blocher: Er liegt zwischen 200'000 und 250'000 Fr., je nach Grösse des Bereiches. Bei einem guten Geschäftsverlauf kann ein Manager dieses Salär verdreifachen. Und wie viel verdient der Chef? Blocher: Seit einigen Jahren liegt mein Jahresgehalt bei 350'000 Fr. Dieser Betrag lässt sich aber nicht vergleichen mit den Löhnen anderer Manager, weil mir ja zwei Drittel der Unternehmung und damit des Gewinns gehören. Das ergibt 120 Mio Fr. fürs Jahr 2001. Blocher: Das ist so, diese gehören mir; auch wenn ich sie in der Unternehmung lasse. Das Gleiche gilt bei einem Verlust. Das macht den Unterschied zwischen einem Manager und einem Unternehmer aus. Darf ein Verwaltungsrat in einem Jahr 1 Mio Fr. verdienen? Blocher: Von mir aus auch viel mehr. Es kommt drauf an, was er bringt. Einer, der nur an vier Sitzungen im Jahr teilnimmt, der wird es nicht bringen. Deshalb habe ich in meinem Unternehmen nur vollamtliche Verwaltungsräte. Wenn die Entscheide des Verwaltungsrates dazu führen, dass die Firma 100 bis 200 Mio Fr. mehr einnimmt, dann darf der VR auch mehr als 1 Mio Fr. verdienen. An den Millionengehältern der Manager stören sich viele Leute; auch solche von der SVP. Blocher: Wissen Sie, mir geht es nicht um die Höhe der Gehälter, sondern darum, dass der Erfolg und die Leistung honoriert werden. Deshalb muss auch der Misserfolg berücksichtigt werden. Ein Manager, der die Leistung nicht bringt, muss weniger ver- dienen oder entlassen werden. Es zählt allein der Erfolg. Bei der Pharma-Vision verdienten Sie als VR-Präsident zu den besten Zeiten 4 Mio Fr., obwohl die Performance hinter dem Pharmaindex herhinkte. Blocher: Die Pharma Vision hat das System zur Salarierung genau festgelegt. Die Zielvorgabe war, 6% Performance pro Jahr zu erreichen. Effektiv erzielten wir auch einmal 30% und mehr. Unter 6% gab es keine Entschädigung. Allerdings mussten die Verwal- tungsräte zuerst 140 Mio Fr. investieren. Kein Erfolg für die Aktionäre - keine Entschädigung für die Verwaltungsräte. Nur haben Sie dafür gar nichts gemacht. Blocher: Doch, wir haben die Beteiligung richtig gewählt. Der Unternehmer hat Erfolg oder Misserfolg, unabhängig seiner Betriebsamkeit. Wenn die Ziele klar definiert sind, interessieren nicht die Gründe, warum etwas so herausgekommen ist. Es hilft nichts, sich auf den 11. September zu berufen. Der Ausschuss der Zulassungskommission der Börse schlägt vor, dass börsenkotierte Unternehmen die Bezüge von VR und Management pauschal offen legen müssen. Genügt Ihnen das? Blocher: Nein, dieser Vorschlag ist wertlos. Pauschale Beträge für einen Verwaltungsrat bringen die erforderliche Transparenz nicht. Für die Wahl des Verwaltungsrates durch die Aktionäre hilft dies nicht weiter. Wie sieht es mit der Transparenz beim Management aus? Blocher: Für die Geschäftsleitung braucht es ebenfalls Transparenz. Vertretbar wäre, nur den Lohn des CEO offen zu legen und den Rest pauschal. Warum soll der Staat der Privatwirtschaft in dieser Frage dreinreden? Blocher: Es gehört zu den primären Aufgaben des Staates, das Privateigentum zu schützen. Bei den grossen Publikumsgesellschaften ist das Eigentum des Aktionärs nicht mehr geschützt. Der Verwaltungsrat kann sich aus der Firmenkasse bedienen, ohne dass die Eigentümer etwas davon merken. Deshalb genügen in dieser Frage nicht Richtlinien. Es muss im rechtlich verbindlichen Börsenkotierungsreglement oder im Börsengesetz festgeschrieben sein, dass dies offen gelegt wird, dann kann sich der Eigentümer schützen. Bei der Aktienrechtsrevision waren Sie noch gegen diese Offenlegung. Blocher: Damals war es noch kein Problem. Heute ist es eines. Passen Doppelmandate von VR-Präsident und CEO zu Ihrem Verständnis von Corporate Governance? Blocher: Damit habe ich keine Mühe. Es entspricht dem klassischen Unternehmer, der Eigentümer und Manager ist. Das ist bei grossen Firmen wie Novartis, CS oder Ciba nicht der Fall. Blocher: Bei den grossen Firmen ist das Kontrollsystem bei einem Doppelmandat tatsächlich zu klein. Die Kontrolle ist bei einer personellen Trennung sicher besser. Aber wichtiger als diese Frage ist jene der Transparenz. Wer kontrolliert eigentlich Sie in Ihrem Unternehmen? Blocher: Neben einem starken Controlling und einem internen Rechnungswesen habe ich Schutzvorschriften für mich eingeführt. Ich habe in keiner meiner Firmen Einzelunterschrift. Aber ganz gefeit ist man natürlich nicht. Kriminelle Dinge oder unvernünftige Entscheide sind nie ausgeschlossen. Mit welcher Airline fliegen Sie ab April ins Ausland? Blocher: Ich nehme jene, die mich am besten und am günstigsten an den gewünschten Ort bringt. In Europa interessant ist die neue Easy-Jet. Früher nahm ich auch Swissair, heute Crossair, aber auch British Airways oder Lufthansa. Ich habe ein unverkrampftes Verhältnis zu den Fluggesellschaften. Auch zur Swiss? Blocher: Mir passt nicht, dass ich mit einer staatlichen Gesellschaft fliegen muss. Aber ich fliege damit, weil der Steuerzahler dann weniger bezahlen muss.

04.03.2002

Il ne reste plus que deux partis

Interview dans Le Temps du 4 mars 2002 Christoph Blocher s'attend "à ce que la Suisse soit soumise à une forte pression dès la semaine prochaine sur le plan du secret bancaire et de la taxation des intérêts". Et d'annoncer une chasse aux sorcières à l'égard des personnalités de son parti qui se sont engagées pour le oui et qui lui ont coûté la victoire. Propos recueillis par Stéphane Zindel Vous aviez qualifié de "majorité de hasard", le oui sorti des urnes le 10 juin dernier en faveur de l'armement des soldats suisses à l'étranger. Diriez-vous de même à propos du vote sur l'ONU? Christoph Blocher: Oui. Au niveau de la majorité des cantons, on peut parler à nouveau de majorité de hasard. La situation est extrêmement serrée dans plusieurs cantons. Si quelques milliers de Lucernois ou quelques centaines de Valaisans avaient voté un peu autrement, le résultat aurait été tout différent. Cela dit, j'ai perdu la votation. Et surtout la Suisse a perdu. Le résultat est ce qu'il est. On ne peut plus rien y changer. Avez-vous fait des erreurs pendant la campagne? Blocher: Nous devrons l'analyser. Nous ne pouvions pas en faire davantage. Nous avons fait le maximum avec les ressources personnelles et financières limitées qui étaient à notre disposition, en nous concentrant sur les cantons importants. Nous n'avions pas les moyens de mener une forte campagne partout. Ce qui nous a certainement beaucoup nui est qu'une partie des représentants de l'UDC se sont laissés instrumentaliser par les partisans de l'adhésion. Ils ont été utilisés quasiment comme figures emblématiques du camp du oui. Je suis convaincu que nous aurions gagné si cela n'avait pas été le cas. Vous pensez au conseiller aux Etats argovien Maximilian Reinmann, connu habituellement pour ses positions très conservatrices? Blocher: Par exemple. Mais aussi l'UDC bernoise - qui a officiellement prôné le oui - comme la section grisonne du reste. Vous noterez au passage que dans les Grisons, l'ensemble des partis gouvernementaux a été désavoué par le peuple - et ce pour la deuxième fois après le 10 juin. Nous allons devoir en tirer les conséquences au sein de l'UDC. Vous niez à un représentant de l'UDC le droit de défendre un oui à l'ONU de bonne foi? Blocher: On peut tout à fait avoir un avis différent de la majorité du parti sur l'une ou l'autre question. Mais lorsque j'ai un avis différent, je ne vais pas aller m'exposer publiquement contre mon parti. En outre, lorsque quelqu'un a un avis différent de la majorité de son parti sur toutes les questions importantes, il devrait songer à changer de parti. A qui pensez-vous? Blocher: Au conseiller national argovien Ulrich Siegrist par exemple ou à sa collègue zurichoise Lisbeth Fehr. On ne peut pas se laisser élire sur un parti qui défend certaines valeurs et une fois élu faire tout à fait autre chose. On ne peut pas se borner à profiter des promesses électorales faites sans les tenir ensuite. Notre parti a un programme très clair qui n'autorise pas des tergiversations ultérieures. Le oui aux soldats à l'armée puis à l'ONU ont certes été serrés, mais le scénario a tendance à se répéter. Sont-ils l'indice que la Suisse a changé? Blocher: Difficile à dire. Dans le cas de l'ONU, c'est la première fois que l'UDC a dû monter au front complètement seule. Dans les votations précédentes, le camp du non était beaucoup plus large. De facto, il n'existe pratiquement plus que deux partis en Suisse sur les questions importantes: l'UDC et les autres. L'UDC est peut-être trop faible pour l'emporter lorsqu'elle est seule et que tous les autres se mettent ensemble - y compris la haute finance et les milieux économiques multinationaux qui ont financé la campagne du oui. Le oui à l'adhésion est-il un drame pour la Suisse? Blocher: Je m'attends à ce que la Suisse soit soumise à nouveau à une forte pression dès la semaine prochaine sur le plan du secret bancaire et de la taxation des intérêts. L'UE et les Etats-Unis ont gentiment attendu le vote sur l'ONU. Maintenant que la Suisse ouvre les vannes et abandonne sa détermination sans faille à vouloir rester un pays indépendant, ils vont revenir à la charge. Qu'est-ce qui vous fait penser cela? Blocher: Je ne suis pas un prophète mais je le sens. Des sources bien informées me le confirment. L'ASIN a-t-elle encore raison d'être? Blocher: Plus que jamais. Pensez-vous que la neutralité ne soit plus menacée? Le Conseil fédéral veut entrer dans l'UE par étapes. Il a désormais atteint la première avec l'adhésion à l'ONU. La deuxième sera de se rapprocher de l'UE par le biais des accords bilatéraux. En abolissant les frontières suisses (accords Schengen) puis en relevant progressivement la TVA à un niveau européen. Nous devons lutter contre ces pas successifs. A quelles calamités vous attendez-vous après le oui? Blocher: Le Conseil fédéral ne pourra pas tenir toutes ses promesses. D'abord sur le plan financier. Si nous étions déjà dans l'ONU, le surcoût ne serait déjà plus de 75 millions par an, comme cela a été dit, mais de près de 100 millions sur la base des nouveaux chiffres du PNB. En matière de neutralité ensuite. On ne pourra plus être neutre à l'égard d'un Etat en conflit avec le Conseil de sécurité - respectivement les grandes puissances qui le contrôlent. CNN a lancé le message ces derniers jours que si la Suisse entrait à l'ONU, la neutralité serait morte. C'est de cette manière que nous sommes désormais perçus. La crédibilité de la neutralité n'est plus assurée. Il ne m'étonnerait pas dans ce contexte que dans les prochains jours les taux d'intérêts à long terme de la Suisse grimpent. L'avantage considérable pour notre marché du travail que nous avons d'avoir des taux bas en comparaison internationale va se réduire dès lors que nous renonçons en partie à être un "Sonderfall". Joseph Deiss est-il le vainqueur du jour? Blocher: Il faut poser cette question à Joseph Deiss lui-même. Une chose est claire: ce résultat ne lui donne pas une marge de manœuvre supplémentaire. 11 cantons et 45% de la population contre lui malgré l'unilatéralité et la massivité de la campagne - relayée par pratiquement tous les médias, ce n'est pas rien. En s'impliquant pareillement dans la campagne et en recourant aux instruments de la propagande, le gouvernement a perdu énormément de plumes dans l'aventure. Le Conseil fédéral n'est plus le Père de la nation pour tous les Suisses. Cela aura des conséquences sérieuses pour lui. Cela changera-t-il si l'UDC obtient un deuxième siège au Conseil fédéral? Blocher: Non. L'UDC ne choisit pas ses conseillers fédéraux. Ils sont élus par les autres partis. Mais si l'UDC gagne les prochaines élections - et le fait que nous ayions perdu aujourd'hui en renforce les chances - les autres partis vont se réveiller et voir que l'on ne peut pas continuer comme cela. Regardez les résultats de ce dimanche. A Winterthur, nous avons gagné 40% de nouveaux sièges. Nous progressons pour la troisième fois. Cela se répercutera aussi au niveau fédéral l'an prochain. Nous devrons alors présenter la quittance des promesses non tenues par le Conseil fédéral.