L’initiative populaire en dernier recours

Interview dans «Le Matin Dimanche» du 22 février 2009

Interview: Stéphanie Germanier

Monsieur Blocher, allez-vous lancer une initiative populaire pour régler la taille et la structure des entreprises telles qu’UBS?
L’initiative populaire serait la solution de dernier recours car elle prendrait beaucoup de temps. C’est aujourd’hui aux partis et au Parlement de faire en sorte qu’on inscrive dans la Constitution ou les lois un article qui règle la structure des grandes banques pour les empêcher de devenir des mastodontes comme UBS.

Qu’est-ce que cela éviterait?
Aujourd’hui UBS et le Credit Suisse sont de trop grandes entités pour notre économie. Leur structure fait peser un risque sur la place financière suisse car elles y tiennent une place disproportionnée et leur implantation à l’étranger met la pression sur les contribuables suisses.

Si vous étiez encore au Conseil fédéral, les choses se seraient-elles passées différemment?
Difficile à dire. Je peux seulement affirmer qu’en 2006 j’avais proposé en vain au Conseil fédéral de lister et de surveiller les entreprises suisses «too big to fail» afin d’avoir un oeil sur leur évolution. A cette époque-là, tous mes anciens collègues me disaient qu’une faillite d’UBS ou du Credit Suisse ne pourrait jamais arriver.

Peter Kurer et Marcel Rohner doivent-ils démissionner?
C’est facile de couper des têtes, beaucoup moins de les remplacer. Déjà à l’époque, j’ai toujours pensé que Marcel Ospel devait rester président d’UBS pour faire le ménage après le chaos qu’il avait contribué à créer. Je pense qu’il doit en être de même aujourd’hui pour Peter Kurer et Marcel Rohner.

Vous critiquez la structure des banques, mais notre système politique qui a laissé faire n’est-il pas lui aussi condamnable?
C’est vrai, mais je persiste à penser que, si on avait morcelé avant les structures d’entreprise, rien de tout cela ne serait arrivé. L’Etat a dû aider UBS sous peine de la mettre en faillite, or cela va à l’encontre des lois du marché. Quand une entreprise ne marche plus, elle doit mourir.

Il fallait laisser mourir UBS?
Non, justement parce qu’elle a trop d’importance pour ne pas être sauvée. Mais il faut désormais que cela change et empêcher que d’autres entreprises n’en arrivent à mettre autant de pression sur notre économie.

Faut-il conserver le secret bancaire?
Bien sûr. Il est indispensable à notre place financière. La FINMA et le gouvernement ont fait une exception dangereuse avec les Etats-Unis. Ils ont échangé des informations sans suivre la voie juridique adéquate, c’est-à-dire sans attendre la décision du Tribunal administratif fédéral. Je ne les comprends vraiment pas. Le Conseil fédéral, la FINMAet le TF savaient que quelque chose allait se passer et personne n’a pris les devants. Ces trois entités auraient pu se réunir et mieux préparer leur riposte au lieu d’attendre le dernier jour pour agir. Gouverner, c’est prévoir.

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